Alors que le secteur immobilier peine à redresser la tête, les signaux de reprise, timides et fragmentés, ne suffisent pas à masquer une réalité tenace : l’année 2025 s’annonce davantage comme un sas de décompression que comme un tremplin. Le rebond, lui, reste à quai. Et ce n’est pas pour tout de suite. Le point sur le sujet avec Kevin Gomez, avocat en droit public !
L’immobilier entre incertitudes et sursauts
Le mot d’ordre, en 2024, fut résistance. Face à une demande en berne, une inflation persistante et des financements à la peine, la filière immobilière a tenu sans rompre. Mais les cicatrices sont visibles. A l’aube de 2025, le paysage reste brouillé. Les perspectives d’un redémarrage tangible ne s’ouvrent pas avant 2026, voire 2027. En attendant, l’Etat et les acteurs du secteur s’agitent pour poser les jalons d’une relance durable. Et dans cette équation, simplifier devient une obsession.
Une loi de finances sous le signe du volontarisme
Pour insuffler un minimum d’élan, le gouvernement a glissé quelques mesures phares dans la loi de finances 2025. Le prêt à taux zéro s’étend désormais à tous les territoires, rompant avec sa limitation aux seules zones tendues. Mieux encore, une exonération des droits de succession jusqu’à 300 000 euros est accordée pour l’achat de logements neufs, à condition qu’ils soient destinés à l’habitation principale ou à la location longue durée. De quoi relancer l’offre ? Pas si simple. Car la vraie bataille se joue ailleurs… dans la complexité kafkaïenne des procédures d’urbanisme !
Réconcilier habitat, emploi et territoires
Sous l’impulsion de la ministre Valérie Létard et du ministre François Rebsamen, une mission parlementaire s’attaque au statut du bailleur privé, avec l’ambition d’attirer des capitaux vers un logement intermédiaire trop longtemps délaissé. Ce levier, soutenu depuis des années par la CCI Paris Île-de-France, pourrait fluidifier l’accès au logement dans des zones stratégiques et redonner de la cohérence au tissu économique.
Mais au-delà des incantations, c’est la proposition de loi portée par Harold Huwart qui retient l’attention. Son ambition ? Simplifier le droit de l’urbanisme et du logement, pour rendre les projets enfin réalisables dans des délais raisonnables. En filigrane, une question fondamentale : dans quelles villes voulons-nous vivre demain ? Et comment les articuler à nos bassins d’emploi sans sacrifier la qualité de vie ?
Des plans locaux d’urbanisme trop rigides
Les PLU doivent cesser de brider l’intelligence du territoire. La mixité fonctionnelle – cet équilibre subtil entre logements, commerces, services et activités économiques – ne peut plus être un vœu pieux. Il faut des outils concrets. Calculer la densité humaine d’un quartier pour déterminer le juste rapport entre habitants, emplois et logements. Intégrer la réversibilité des bâtiments dans les règlements pour que les usages évoluent avec les besoins. Permettre des dérogations aux PLU sur dossier solide. Et surtout, faire en sorte que les droits à construire ne soient plus théoriques mais bel et bien utilisables.
Autre levier : le logement intermédiaire. Trop souvent mis de côté dans les politiques locales, il doit retrouver sa place dans le quota de logements sociaux à produire, pour permettre aux salariés de se loger près de leur lieu de travail. Une évidence, encore ignorée par nombre de maires.
Raccourcir les délais de l’urbanisme opérationnel
Quand un projet met jusqu’à dix ans pour émerger, la réalité finit toujours par rattraper les plans initiaux. Il faut casser ce cycle absurde. La fusion des procédures, comme la création d’opérations d’aménagement couplée à l’adaptation des documents d’urbanisme, offre déjà une première piste. Encore faut-il généraliser ces dispositifs « intégrés ». Dans cette même logique, l’Association Foncière Urbaine de Projet (AFUP) doit être renforcée. Elle permet de rendre les propriétaires privés acteurs des aménagements, plutôt que simples spectateurs. Quant au Partenariat Urbain Public-Privé (PUP), il pourrait devenir un levier financier incontournable, à condition d’être soutenu par des outils incitatifs solides.
L’autorisation, cette montagne administrative
Simplifier l’octroi des permis ne relève plus du confort, mais de la survie économique. Le certificat de projet doit être généralisé à tous les types d’opérations, pour sécuriser l’autorisation en amont. La pré-instruction, encore trop peu utilisée, permettrait aux porteurs de projets d’éviter bien des blocages. Enfin, la dématérialisation des procédures doit être totale, y compris pour la délivrance des autorisations, et non cantonnée à l’instruction. Certaines innovations pourraient même changer la donne : permis multisites pour intervenir sur plusieurs lieux, permis multidestinations pour s’adapter à l’évolution des usages, et permis d’innover pour permettre des solutions techniques hors normes mais pertinentes.